#3 Rencontre avec Gary, Alistair & Mitch
Park Rangers dans l'Outback
Sur la route pour une semaine à la découverte des grands espaces du centre ouest du Queensland, appelés plus généralement l’Outback, nous sommes accompagnés par Gary Jorgensen, senior ranger.
Gary est ranger depuis 41 ans et travaille dans cette région depuis 2011. Basé à Longreach, il supervise 15 personnes, répartis dans 14 parcs nationaux, s’étendant sur plus de 3,5 millions d’hectares !! Assez d’espaces Gary ? « oui, c’est pas mal » me répond-il !
Notre itinéraire nous conduit tout d’abord dans le parc national de Bladensburg, où nous rencontrons Alistair Hartley, ranger en chef du parc.
Nous passons la nuit dans la base. Alistair vit ici avec sa femme et sa petite fille. Il travaille au quotidien avec 3 autres rangers. Leurs premiers voisins sont à 80 km, il faut aimer la vie en solitaire, ce n’est pas pour tout le monde, en tout cas Alistair est très heureux ainsi et ne troquerait sa place pour rien au monde. Né dans le bush d’Afrique du Sud, il a grandi dans le bush australien. Il a bien essayé d’habiter en ville, mais très peu pour lui. Ce qu’il aime, c’est veiller à la protection de ce grand parc et d’être réveillé par les kangourous qui adorent sauter autour de sa maison !
Comment occupe-t-il ses journées? Une part importante de son travail consiste à la gestion des animaux nuisibles. Le parc de Bladensburg est le foyer d’une vingtaine d’écosystèmes. Parce qu’il est vital de protéger cette biodiversité, un programme entier de contrôle des animaux indésirables a été mis en place.
En quoi cela consiste?
Ce programme a pour but de réduire les animaux nuisibles dans les parcs nationaux afin de protéger et sauvegarder les espèces endémiques. En effet, les nuisibles menacent la faune et la flore du pays mars le biais de la prédation et de la concurrence pour la nourriture.
Alistair et ses collègues contrôlent les animaux sauvages qui ne sont pas natifs d’Australie, mais qui ont été importés par les premiers colons…dans le cas de Bladensburg, il s’agit des cochons, des chats et des chiens sauvages. Ils sont les pires ennemis des locaux.
Ces terres sont rudes, il n’y a pas assez à manger pour tout le monde, c’est pourquoi de grosses mesures doivent être prises : il faut éliminer les espèces nuisibles.
Comment faire?
Les rangers installent des pièges. Les animaux capturés sont tués. S’en suit toute une analyse scientifique de son estomac notamment. Son AND est aussi contrôlé. Des registres sont tenus à jour et des statistiques sont établit.
En fonction des parcs et de la saison, les priorités peuvent varier. Des programmes intensifs sont mis en place parfois quand il est urgent d’éradiquer une espèce. Cela peut paraitre brutal mais cela a permis de sauver des espèces endémiques comme le bilby (cf My new mates #3 the Bilby).
Le moment est venu de quitter Alistair et sa petite famille et de reprendre la route. Direction l’immense parc national de la Diamantina maintenant. Quelques 500 000 hectares!! Après trois heures de route sur un chemin de terre sableuse, nous traversons des plaines arides et des montagnes au sommet plat (une sorte de pyramide naturelle écrasée, très curieux), nous arrivons à la base des rangers, après n’avoir croisé que 2 voitures en tout et pour tout !
Chris Mitchell, surnommé Mitch, nous accueille. Il est le ranger en charge du parc. Autour d’un « barbie » ( barbecue en australien!), il partage avec nous son quotidien de ranger dans un espace si vaste, isolé et aride. Ici ne cherchez pas les nuages dans le ciel…la dernière pluie ? Février peut être… Nous sommes en septembre ! Ce pays est difficile, chaud et poussiéreux, très poussiéreux ! Ici personne ne vit à part Mitch et sa femme ainsi que Flint, nouvelle recrue chez les rangers.
La plus proche station essence est à Boulia (183 km)… le premier aéroport? Longreach, à “seulement” 6 heures de routes… et ce n’est pas vraiment ce que l’on peut appeler un hub international ! Une connexion quotidienne pour Brisbane et quelques vols desservant les alentours.
Qu’en est-il de la communication avec le reste du monde ?
Il n’y a encore pas si longtemps, le télégramme était l’unique moyen de communication avec l’extérieur. Aujourd’hui, internet, le téléphone et la radio sont disponibles par satellite. Cependant, pas encore de réseau mobile traditionnel. Pour le courrier, il est livré deux fois par semaine par camion.
Par ailleurs, ce parc est une zone inondable, les routes sablonneuses deviennent très facilement impraticables. Les gens qui habitent la région doivent pouvoir être autonomes en nourriture pendant plusieurs semaines en cas d’inondation.
L’électricité est fournie en quasi-totalité par les panneaux solaires, un générateur prend le relais en cas de fortes pluies.
Qu’en pensez-vous? Vous vous imaginez vivre dans un endroit si reculé? Mieux vaut être organisé, indépendant et aimer les grands espaces ! Mitch le ranger est comme un poisson dans l’eau si je puis dire ! Il adore ces contrées et ne se voit pas travailler dans un parc plus petit. C’est un peu comme quand vous avez une grosse voiture, impossible de repasser au petit modèle ! Lol.
Ce parc n’a pas toujours été classé. En effet, du bétail avait l’habitude de courir dans les terres de Diamantina, qui était l’une des plus grandes exploitations agricoles du pays entier avec plus de 12 000 bêtes ! C’est en 1992 que le Gouvernement du Queensland décide de racheter les 500 000 hectares et de les convertir en zone protégée. Il n’est pas rare d’y croiser encore quelques troupeaux, même si l’objectif actuel est d’exclure le parc au bétail.
Les impacts plus ou moins directs des troupeaux sur la faune et la flore du parc sont multiples: compression des sols, concurrence pour la nourriture avec des animaux locaux, modification de l’habitat, augmentation de l’érosion, dégradation de la qualité de l’eau des bassins…C’est pourquoi quelques 800 km de barrière ont été érigés! De quoi tenir occupés Mitch et Flint pendant un bon moment !
Sinon, Mitch va bientôt reprendre la main sur un programme scientifique un peu particulier : l’étude de la poussière ! Ça peut paraitre un peu bizarre mais il s’agit d’un programme très sérieux pour lequel des fonds ont été débloqués. Il s’avère en fait que les vents chauds de cette zone désertique soufflent une poussière riche en nutriment qui nourrit les coraux de la Grande Barrière de Corail !!Si si je vous assure, au final le monde est petit même dans le Queensland et ses 1 852 642 km2.
Pour conclure, j’ai demandé à mes trois nouveaux collègues ce qu’ils appréciaient le plus dans ce pays. Leur réponse a été unanime : le calme ! Après une semaine passée ici, je peux admettre qu’à première vue, on peut se sentir perdue dans ces contrées plates et désertiques. Mais une fois que l’on commence à les explorer, notre regard change et on se sent finalement privilégié de pouvoir contempler ces horizons à perte de vue !
Pour en savoir plus sur l'Outback:
Publié le 10 septembre 2013